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Le plan d’étude donne lieu à des produits de prévision novateurs pour le Bassin du lac Champlain et de la rivière Richelieu

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Pierre-Yves Caux

Pierre-Yves Caux
Directeur, Sciences et ingénierie
CMI, Ottawa

 

Le bassin du lac Champlain et de la rivière Richelieu chevauche la frontière canado-américaine et s’étend des États du Vermont et de New York à la province de Québec. Il a été inondé plusieurs fois, mais on travaille à mettre au point un système de prévision en temps réel des inondations et de cartographie des plaines inondables.

Le débit du lac Champlain est contrôlé par un long obstacle naturel, les hauts-fonds rocheux de Saint-Jean-sur-Richelieu. Les hauts-fonds réduisent le débit de la rivière de sorte que l’eau monte au moment de la fonte printanière au point d’inonder parfois les basses terres qui bordent le lac et la rivière. L’effet peut être exacerbé au printemps par un réchauffement soudain de la température, des précipitations persistentes et des vents forts.Le bassin du lac Champlain et de la rivière Richelieu. Carte : Google Maps.

Dans le bassin, des crues records ont été enregistrées dès 1869. Au printemps de 2011, le niveau du lac a atteint 103,2 pieds (31,5 mètres), ce qui a eu un impact énorme sur les habitants et les ressources de l’écosystème du bassin, les dommages signalés s’élevant à environ 88,5 millions de dollars américains.

Les dommages sont survenus à 79 % au Québec, à 10 % au Vermont et à 11 % dans l’État de New York. Les eaux ont dépassé le niveau d’inondation le 13 avril 2011 et sont demeurées au-dessus jusqu’au 19 juin 2011 – un total de 67 jours.

Mesures possibles d’atténuation des crues

Les dégâts considérables occasionnés aux terres agricoles et aux immeubles résidentiels et commerciaux ont donné lieu à des plaintes de la part des citoyens et à la présentation de demandes d’aide aux gouvernements. À plusieurs occasions, les gouvernements ont demandé à la Commission mixte internationale (CMI) d’approfondir l’étude du bassin et de se pencher sur les mesures possibles pour atténuer les crues.

On débat toujours du bien-fondé de régulariser artificiellement le niveau du lac Champlain, mais on s’entend sur une chose : il y a encore beaucoup à apprendre sur l’hydrosystème du point de vue scientifique avant que nous puissions décider des mesures d’atténuation.

En 2012, les gouvernements du Canada et des États-Unis ont demandé à la CMI d’envisager une étude complète des mesures pour atténuer les crues et l’impact des inondations dans le bassin du lac Champlain et de la rivière Richelieu et de formuler des recommandations.

En 2013, la CMI a donc soumis un plan d’étude. En fonction du plan, les gouvernements ont ensuite demandé que la CMI se penche sur les lacunes dans nos connaissances de l’hydrologie du bassin et établisse des cartes des plaines inondables.

À l’automne de 2014, la Commission a créé le Groupe de travail technique, composé de spécialistes des deux pays, qui a effectué les travaux voulus et soumis un rapport. Les travaux ont permis de produire, de réunir et d’analyser des données nouvelles ou déjà disponibles en vue d’établir un système opérationnel en temps réel de prévision des inondations et de cartographie des plaines inondables.

(Voir aussi: La CMI produit un rapport sur la prévision des crues ainsi que des cartes d’inondation pour le lac Champlain et la rivière Richelieu)

Il reste des travaux à faire pour achever le système, mais ils sont essentiels à la recherche de solutions pour gérer les plaines inondables et d’un éventail de mesures structurelles et non structurelles de prévention et d’atténuation des crues.Équipement de levés pour la correction des référents altimétriques. Photo : Robert Flynn, USGS.

Amélioration des prévisions

La collaboration binationale a donné lieu à des données nouvelles et à des produits novateurs.

Avec les données disponibles, on a produit un nouveau modèle hydrodynamique bidimensionnel du bassin qui a permis de saisir tous les éléments hydrologiques qui n’étaient pas pris en compte auparavant. Ces éléments comprennent : les ponts-jetées sur le lac Champlain, qui causent des points de rétrécissement (resserrements qui contraignent l’écoulement de l’eau), et le vieux barrage Fryers en aval de la ville de Saint-Jean, dont les 30 piliers en béton en travers de la Richelieu restreignent le débit de celle-ci.

L’évaluation des paramètres météorologiques a été perfectionnée pour améliorer la prévision à court et à long terme des précipitations, des vents et de la température dans le bassin. Ce progrès est important pour la gestion et l’atténuation des risques, car il augmente la précision et la fiabilité des prévisions aux fins de la modélisation des crues. La différence entre les systèmes de référence altimétrique (qui définissent la hauteur d’un objet par rapport au niveau de la mer) a été résolue. Cette différence vient du fait que les administrations n’appliquent pas les mêmes critères et interprètent différemment les données, ce qui a pour effet que les entités physiques sont décalées à la frontière. Là encore, les travaux réalisés ont servi à réduire l’incertitude des prévisions de crue dans le bassin.

En concertation avec le Groupe de travail technique, la CMI a élaboré une application Web qui présente chacun des scénarios d’inondation décrits dans le projet de rapport.

Le produit en ligne illustre l’inondation du bassin en fonction de 11 hauteurs d’eau du lac Champlain, y compris le niveau de 2011, soit 102,8 pieds (31,3 mètres). Il décrit les zones inondées, la hauteur de crue et l’incertitude des prévisions quant à la superficie touchée.

Cette cartographie des plaines inondables peut servir aux intervenants d’urgence, aux urbanistes, aux municipalités et aux organismes de sécurité publique.
Cette cartographie des plaines inondables peut servir aux intervenants d’urgence, aux urbanistes, aux municipalités et aux organismes de sécurité publique.

Et maintenant?

En décembre 2015 s’est terminée une période de consultation publique d’un mois, qui a été suivie de séances d’information des groupes cibles d’utilisateurs à Burlington, au Vermont, et à Saint-Jean-sur-Richelieu, au Québec. Les produits sont destinés à ceux qui s’en serviraient dans l’exécution de leur travail, comme les intervenants d’urgence, les urbanistes, les municipalités et les organismes de sécurité publique. Les personnes qui ont participé aux séances ont bien accueilli les produits et ont formulé des observations utiles.

Une séance d’information à Saint-Jean-sur-Richelieu, au Québec. Photo : Madeleine Papineau.
Une séance d’information à Saint-Jean-sur-Richelieu, au Québec. Photo : Madeleine Papineau.

Compte tenu du besoin reconnu par les utilisateurs et le public de donner suite au plan d’étude, la CMI envisage deux scénarios possibles. Le premier est de faciliter la coordination et la réalisation d’un système de prévision en temps réel pour le bassin du lac Champlain et de la rivière Richelieu. Le second est de travailler à des éléments du plan qui n’étaient pas prévus dans la demande d’origine, tels que l’évaluation des impacts passés, les pratiques de gestion et les stratégies d’adaptation, et d’évaluer des mesures d’atténuation faciles ou moyennement difficiles à appliquer ainsi que leurs effets.

Les résultats de l’étude s’accordent avec les efforts actuellement déployés par les gouvernements pour disposer des informations scientifiques les plus actuelles et crédibles afin d’atténuer les risques d’inondation et de préparer correctement les interventions d’urgence. La CMI recommande que ce système de prévision en temps réel soit achevé pour le bassin du lac Champlain et de la rivière Richelieu dans son entier.

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