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Une peau virtuelle (technologie e-skin) pourrait contribuer à la lutte contre la lamproie marine

e skin testing lamprey

À cause de la détérioration des barrages qui harnachent les affluents des Grands Lacs, il est de plus en plus nécessaire d’adopter des stratégies permettant le laisser passer les poissons indigènes et désirables et de bloquer ou d’éliminent les espèces envahissantes ou indésirables. Or s’agissant de contrôler le franchissement des poissons dans les Grands Lacs, l’aménagement de structures de passage est compliqué par la présence de la lamproie marine dont la détection est dès lors fondamentale.

C’est à cette fin que des chercheurs de la Michigan State University et de la Hammond Bay Biological Station de l’US Geological Survey ont mis au point une peau virtuelle, ou e-peau, apte à détecter sans intervention extérieure la présence des lamproies marines parasites qui se fixent à cette peau électronique grâce à leur ventouse bucale.

C’est ce que font habituellement les individus adultes qui s’arriment à des surfaces lisses pour faire une pause durant leur périple migratoire. La peau virtuelle, qui imite donc la peau humaine, permet de détecter la succion qu’ils exercent dans ces moments-là. Les travaux sont financés par le Programme de recherche sur la lamproie marine de la Commission des pêcheries des Grands Lacs.

L’e-peau est en fait constituée de capteurs de pression souples intégrés à un substrat flexible qu’il est possible d’appliquer sur des surfaces non lisses (comme des barrages ou des rochers) à l’intérieur ou à proximité des passes à poissons.

Ce système est fondé sur le principe voulant qu’en exerçant une succion sur l’e-peau, la bouche de la lamproie produit un profil de pression distinct du frottement des autres poissons. En surveillant la répartition de la pression sur l’e-peau, les chercheurs espèrent détecter la présence des lamproies, puis les repousser en les soumettant à un stimulus électrique localisé.

Quand elle sera définitivement au point, la technologie intelligente de l’e-peau pourra également être déployée dans les cours d’eau afin de déterminer le moment de l’entrée et de la migration en amont des lamproies marines, afin de comprendre leur comportement dans leur quête de refuges.

L’équipe de développement s’est concentrée sur le principe de détection de la pression d’après les changements de capacitance résultant dans les condensateurs. Un condensateur, tout comme une résistance, est un élément de base des circuits électriques ayant pour fonction d’entreposer de l’énergie.

En ménageant des micropoches d’air dans le substrat souple, l’équipe est parvenue à créer une peau virtuelle qui réagit aux pressions positives et négatives. La démonstration a été faite que le dispositif peut capter la distribution des pressions induites par une ventouse sous l’eau (qui imite la succion de la lamproie marine).

Les résultats de cette recherche ont été publiés dans la revue scientifique Advanced Functional Materials.

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(À gauche) Une ventouse, qui reproduit la bouche d’une lamproie marine, est utilisée pour tester la réaction de la peau virtuelle. (À droite) La réaction de la peau virtuelle est comparable à la pression d’aspiration typique d’une lamproie placée dans un courant rapide. Crédit photo : Hongyang Shi (données inédites)

Les chercheurs ont également mené des tests préliminaires sur des lamproies marines dans un réservoir d’eau stagnante. Les essais n’ont pas permis de mesurer les profils de pression, comme cela avait été le cas avec des ventouses, mais l’équipe a tiré plusieurs constats à cet égard.

À l’aide d’un autre appareil de détection de pression personnalisé, l’équipe a déterminé que la pression négative exercée par la ventouse d’une lamproie est plus faible en eau calme que dans une eau en mouvement rapide. Contrairement à une ventouse, la pression d’aspiration de la lamproie varie rapidement dans le temps. À moins que les changements de capacitance de tous les condensateurs puissent être lus assez rapidement, la peau électronique ne pourra pas capter le profil de pression d’aspiration caractéristique de la lamproie et ne pourra donc pas en détecter la fixation.

L’équipe s’est attaqué à ces défis techniques et souhaite mener une autre série de tests sur ces animaux à l’été 2020.

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