Une étude révèle que des poissons franchissent les barrages et parcourent tout le réseau de la rivière Rouge

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Kevin Bunch
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Selon des données récentes provenant d’une étude financée par la CMI, certaines espèces de poissons montent et descendent la rivière Rouge sur presque toute sa longueur et tout au long de l’année, franchissant au passage les barrages dotés de passes migratoires.

L’étude télémétrique des poissons ayant permis ces constats a été entamée en 2016, conjointement par l’Université du Nebraska-Lincoln et par le ministère des Pêches et des Océans du Canada grâce au financement de partenaires binationaux, dont l’Initiative internationale sur les bassins hydrographiques (IIBH) de la CMI.

L’étude repose sur l’emploi d’émetteurs insérés dans des poissons interceptés grâce auxquels il est possible de suivre leurs déplacements dans tout le bassin de la rivière Rouge, soit dans la rivière elle-même, dans ses affluents et dans le lac Winnipeg. Quelque 250 « stations réceptrices », réparties tout au long de la rivière Rouge jusqu’au lac Winnipeg et à la rivière Assiniboine, permettent de pister les poissons marqués, et ce durant toute leur vie.

Le projet s’intéresse plus particulièrement à l’esturgeon jaune, un poisson emblématique de la culture autochtone du bassin. L’espèce a été activement réensemencée dans tout le territoire de la Nation Red Lake et du Minnesota à compter de 1997 afin d’aider les populations à se redresser d’un déclin historique survenu au XIXe siècle, essentiellement sous l’effet de la construction de barrages. Au fil des ans, les membres du projet ont marqué d’autres poissons, comme le buffalo à grande bouche (désigné espèce préoccupante aux termes de la Loi sur les espèces en péril du Canada de 2011), la barbue de rivière, le doré jaune, le doré noir, le malachigan, la lotte, le grand corégone et la carpe non indigène.

En 2023, les chercheurs ont posé des émetteurs acoustiques sur 34 poissons, principalement des buffalos à grande bouche et des malachigans, ainsi que sur quelques esturgeons jaunes. Il importe de savoir à quelles périodes ces espèces se déplacent et quels lieux elles fréquentent si l’on veut parvenir à rétablir les populations de buffalos à grande bouche et les autres espèces, et à délimiter les zones critiques au frai et à l’élevage.

« Le buffalo à grande bouche parcourt de très grandes distances », précise Marshall Stuart, un étudiant diplômé de l’Université du Nebraska qui participe à l’étude. « D’après les tendances observées, les poissons se déplacent vers l’amont à l’automne pour hiverner du côté américain, puis redescendent le réseau au printemps pour aller frayer, probablement dans les rivières La Salle, Seine ou d’autres affluents. »

Selon M. Stuart, nous savons maintenant que des esturgeons jaunes étiquetés en 2021 dans la rivière Otter Tail (près du cours supérieur de la rivière Rouge) ont parcouru tout le réseau de la rivière Rouge, jusqu’au lac Winnipeg.

Ce qui n’est vraiment pas une promenade de santé pour les poissons.

La rivière Rouge et ses tributaires sont jalonnés de barrages à faible hauteur de chute. Ces dernières années, le US Army Corps of Engineers a modifié ou démonté certains de ces barrages afin de favoriser le passage des poissons et la frai. Le programme de télémesure peut aider à voir à quel point la circulation des poissons est fluide.

Selon le rapport 2022-2023 du projet, sur les 77 « obstacles majeurs » que comporte le réseau, 41 ont été modifiés ou éliminés. Le barrage de Drayton a été le tout dernier à être modifié, en septembre 2023, quand il a été doté d’une passe migratoire faite de pierres et de cailloux, nous apprend M. Stuart.

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Le barrage de Drayton en 2022 et en 2023, avant (à gauche) et après (à droite) l’installation d’une passe à poissons destinée à permettre aux différentes espèces de remonter la rivière Rouge. Crédit photo : Marshall Stuart

Drayton était le dernier barrage non modifié sur le tronçon américain du bras principal de la rivière Rouge, mais il y en a d’autres sur certains affluents. Les stations de télémesure nouvellement installées le long des rivières Red Lake et Otter Tail aideront à évaluer les évolutions des poissons dans les affluents et à savoir si des barrages entravent leurs déplacements, précise M. Stuart.

« Par le passé, nous avons vu des poissons évoluer dans le bassin de la rivière du lac Rouge, mais nous ne savions pas jusqu’où ils allaient », nous apprend M. Stuart. « Grâce aux émetteurs, nous savons maintenant jusqu’où ils vont et comment ils se répartissent dans le réseau en cours d’année. »

La Nation de Red Lake a ensemencé l’esturgeon jaune dans les affluents de la rivière Rouge sous la coordination du Minnesota Department of Natural Resources. Il est important de veiller à ce que ces poissons aient accès sans restriction à leur habitat de frai préféré pour favoriser la restauration de l’espèce, précise Mark Pegg, écologiste des pêches de l’Université du Nebraska-Lincoln et responsable du projet.

Le financement de la CMI pour cette étude télémétrique a été attribué jusqu’en 2024 par l’entremise de l’IIBH, bien que Mark Pegg espère que le projet se poursuivra aussi longtemps que les partenaires du projet pourront obtenir le financement nécessaire.

 « Je ne sais pas quand le projet se terminera au juste, mais comme la dérivation de Fargo (région de Moorhead) (lien en anglais seulement) est en cours de construction, il va falloir répondre à de grandes questions sur l’impact de la modification du cours d’eau sur l’accès des poissons vers l’amont et vers l’aval », conclut Pegg. aval », conclut Pegg.

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Kevin Bunch

Kevin Bunch is a writer-communications specialist at the IJC’s US Section office in Washington, D.C.