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Où ce petit poisson en voie de disparition passe-t-il ses hivers?

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Kevin Bunch
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Une étude réalisée par l’Université de Guelph a permis de découvrir où le méné long, un poisson menacé d’extinction, passe ses hivers et de constater qu’il est sensible à certains polluants, comme le sel de voirie.

Selon Jaclyn Cockburn, professeure agrégée de géographie à l’Université de Guelph, le méné long joue un rôle majeur dans la chaîne alimentaire locale parce qu’il chasse et mange des insectes terrestres tout en constituant lui-même une source de nourriture pour les poissons plus gros.

Au Canada, le méné long n’est présent que dans quelques affluents du lac Ontario (dans sa partie occidentale), et des lacs Érié et Huron. Comme ce poisson est très sensible à la dégradation de son habitat et à la qualité de l’eau, il s’est fait plus rare dans le sud de l’Ontario en général et dans la région de Toronto en particulier. Une étude de 2007 avait permis d’établir où il vit pendant les mois plus chauds, mais ce n’est qu’au début de 2014 qu’une autre étude a été entreprise pour délimiter son habitat d’hiver, information qui allait être utile pour la gestion des pêches et l’élaboration de plans de conservation et de restauration.

Voilà donc le défi qui attendait Lindsay Davis, chef de projet et ancienne étudiante diplômée de Guelph.

Les cours d’eau gèlent en hiver et comme le méné long est une espèce menacée, la pêche à l’électricité est interdite. Les cours d’eau sont également trop peu profonds pour qu’il soit possible d’y plonger avec bouteilles ou tuba, ce qui n’est de toute façon pas recommandable en hiver. Une partie du travail de Lindsay Davis a donc consisté à trouver une façon viable de prendre ce poisson en filature. Elle a décidé pour cela de positionner de petits appareils photos dont l’obturateur était réglé pour s’ouvrir aux 30 minutes, puis elle a publié les résultats de son expérience dans le Journal of Freshwater Ecology en 2016.

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Le ruisseau Fletcher, près de Mississauga, en Ontario, a été l’un des sites d’étude du méné long à la fin de 2015. Crédit photo : Jaclyn Cockburn

L’étude a porté sur différents cours d’eau de la région de Toronto, y compris des cours d’eau restaurés et d’autres se trouvant dans des terres protégées, demeurés essentiellement intacts, et elle a fait appel à de multiples emplacements dans chaque cas.

Les chercheurs ont découvert qu’en hiver, le méné long préfère se réfugier dans des zones jonchées de débris ligneux — soit des parties d’arbres ayant poussé ou étant tombées dans l’eau — car cela lui permet de se cacher et de se protéger contre les prédateurs dont les insectes terrestres ont tendance à rester proches.

Bien qu’excellent nageur, le méné long n’aime pas trop s’éloigner de son habitat s’il n’est pas obligé de le faire, précise Jaclyn Cockburn. Il semble éviter les zones principalement constituées de galets ou de végétation aquatique. L’étude a aussi fait ressortir qu’il importe peu que le cours d’eau soit restauré ou à l’état naturel et, tant qu’il présente des habitats appropriés, le méné long a tendance à les fréquenter de préférence.

De plus, les ménés longs étudiés ont évité les zones où la teneur en sels dissous était « hors normes », ajoute Mme Cockburn.

Les valeurs élevées constatées étaient probablement le résultat du déversement du sel de voirie dans les cours d’eau, et le méné long semble sensible à ce polluant en particulier. Cela peut être problématique en hiver, car les zones où la température de l’eau reste dans la plage idéale du méné peuvent correspondre à des lieux de déversement du sel dissous dans les cours d’eau. Jaclyn Cockburn fait remarquer que l’habitat hivernal de l’espèce est plus fragmenté que son habitat par temps plus chaud, notamment en raison de la baisse du niveau d’eau en hiver et de la présence d’une couche de glace.

Le travail sur le terrain a pris fin en 2016, mais selon Mme Cockburn, les résultats définitifs de l’étude doivent toujours être publiés dans une revue scientifique.

Dans l’avenir, l’équipe de recherche va s’intéresser aux cours d’eau dans la partie est de Toronto, qui présentent notamment plus de barrages de castors que les cours d’eau étudiés précédemment.

Les castors sont naturellement attirés par les sites où les cours d’eau ont été restaurés et, quand ils les ont colonisés, les différentes espèces de poisson ont tendance à les suivre très vite. Toujours selon Mme Cockburn, les chercheurs aimeraient déterminer si le méné long fait partie des espèces qui étendent leur aire de répartition au gré du retour du castor dans ces cours d’eau.

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Kevin Bunch

Kevin Bunch is a writer-communications specialist at the IJC’s US Section office in Washington, D.C.

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