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La prolifération d’algues nuisibles dans le lac Érié ne sera pas aussi étendue cet été

kevin bunch
Kevin Bunch
Algal blooms on Lake Erie
Prolifération d’algues dans le bassin ouest du lac Érié en août 2015. Source : NOAA.
Prolifération d’algues dans le bassin ouest du lac Érié en août 2015. Source : NOAA.

Il est prévu que la prolifération d’algues dans le bassin ouest du lac Érié en 2016 ne sera pas aussi grave qu’en 2015, principalement en raison de la réduction de l’apport de nutriments provenant de la rivière Maumee pendant la période allant de mars à juillet, bien qu’elle pourrait encore être assez étendue pour être considérée une « prolifération préoccupante », d’après la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) des États-Unis.

Selon Jeff Reutter, conseiller spécial au sein du Stone Laboratory de l’Ohio State University, les proliférations d’algues nuisibles, ou PAN, dans le lac Érié peuvent être prévues avec exactitude d’après l’apport en phosphore dans la rivière Maumee au printemps. En raison de conditions printanières plus sèches que les trois années précédentes et de l’absence d’une onde de tempêtes en juin pour grossir le débit dans la rivière Maumee – comme cela a été le cas en 2015 – il y a moins de phosphore d’autres nutriments dans l’ensemble du bassin ouest que l’année dernière.

Le bureau de la NOAA estime que le niveau de gravité se situera à 5,5 cette année, d’après la biomasse d’algues nuisibles dans le lac. Une prolifération de niveau de gravité de plus de 5,0 est considérée comme préoccupante. La prolifération de 2015 se situait à un niveau de gravité de 10,5 selon l’indice cyanobactérien de la NOAA, ce qui en a fait la prolifération la plus étendue jamais enregistrée. Une prolifération d’un niveau de gravité entre 2 et 4 est considérée « légère », et entre 0 et 2, « peu importante », a expliqué Rick Stumpf, qui travaille aux National Centers for Coastal Ocean Science de la NOAA. Une prolifération plus grave n’est pas forcément plus toxique, selon M. Stumpf. Le niveau de toxicité de la prolifération de 2015 s’élevait à seulement 25 % de celui de la prolifération de 2014, d’un niveau de gravité de 6,5. Les concentrations de toxines dans la colonne d’eau peuvent également varier de la surface au fond du lac.  

Il est prévu que le niveau de gravité de la prolifération d’algues nuisibles en 2016 dans le lac Érié s’élèvera à 5,5 sur l’échelle de gravité de 10 points, qui permet de mesurer l’étendue d’une prolifération. Cette figure découle des résultats de plusieurs modèles différents. Source : Rick Stumpf.
Il est prévu que le niveau de gravité de la prolifération d’algues nuisibles en 2016 dans le lac Érié s’élèvera à 5,5 sur l’échelle de gravité de 10 points, qui permet de mesurer l’étendue d’une prolifération. Cette figure découle des résultats de plusieurs modèles différents. Source : Rick Stumpf.

Les PAN peuvent poser de graves risques pour la santé et la sécurité. La ville de Toledo a émis en août 2014 un avis d’interdiction de boire l’eau du système d’approvisionnement municipal pendant plus de deux jours en raison de la présence de cyanotoxines dans l’eau brute et l’eau traitée. Les cyanotoxines peuvent être dangereusement toxiques, même dans des contextes récréatifs. En 2015, a expliqué M. Stumpf, les concentrations de toxines dans le bassin ouest du lac Érié atteignaient jusqu’à 3 000 parties par milliard (ppb), alors qu’une concentration de plus de 10 ppb est toxique pour les nageurs.

Selon la NOAA, le contact cutané avec les toxines présentes dans les proliférations peut causer des éruptions cutanées, de l’urticaire et des cloques, alors que l’ingestion de ces toxines peut provoquer la diarrhée, des vomissements, l’empoisonnement du foie et des symptômes de neurotoxicité, allant de l’engourdissement à des étourdissements chez les humains et de convulsions, d’une salivation excessive à la mort chez les chiens. L’ébullition de l’eau ou l’utilisation de systèmes de filtration standards n’éliminent pas non plus les toxines de l’eau contaminée. La NOAA recommande également d’attendre plusieurs semaines après la disparition d’une prolifération avant d’aller à l’eau, car elle peut simplement s’être enfoncée sous la surface et les toxines peuvent rester dans la colonne d’eau pendant des jours, voire des semaines. La NOAA conseille également aux gens de faire attention quand ils mangent du poisson capturé dans la zone de prolifération. Bien que de données soient disponibles sur l’accumulation de ces toxines chez le poisson, la NOAA suggère d’éviter de manger le foie et les viscères et de bien nettoyer les autres parties du poisson.

Environnement et Changement climatique Canada a constaté que le phosphore était déjà un moteur des proliférations algales dans les années 1960. Des mesures binationales ont alors été prises en vertu de l’Accord de 1972 relatif à la qualité de l’eau dans les Grands Lacs pour y réduire les concentrations de phosphore. Ces mesures ont permis de réduire considérablement les PAN comme problème majeur dans le lac Érié, quoique temporairement. Au milieu des années 1990, le problème des PAN a refait surface en raison d’une augmentation de la concentration de la forme du phosphore appelée phosphore réactif dissous. Les moules quagga et zébrées, des espèces envahissantes, ont également joué un rôle important, parce qu’elles transportent des nutriments plus près des rives, ce qui perturbe la dynamique des nutriments dans le lac. En dernier lieu, les changements climatiques ont une incidence sur l’apport de nutriments dans les cours d’eau qui se déversent dans le lac Érié et la température de l’eau, qui a un effet sur les taux de croissance des algues.

Une poignée d’échantillons d’algues nuisibles sont préparés aux fins d’analyse au Great Lakes Environmental Research Laboratory de la NOAA en 2015. Source : NOAA.
Une poignée d’échantillons d’algues nuisibles sont préparés aux fins d’analyse au Great Lakes Environmental Research Laboratory de la NOAA en 2015. Source : NOAA.

En février dernier, le Canada et les États-Unis ont convenu de cibles de réduction des concentrations de phosphore de 40 % par rapport à l’année de référence de 2008, afin de réduire les proliférations d’algues dans le lac Érié. Chaque pays doit maintenant se doter d’un plan d’action national d’ici février 2018 pour atteindre ces cibles, qui inclut une évaluation des conditions environnementales, l’identification des priorités au titre du suivi international et de la recherche, ainsi que des mesures prioritaires pour réduire les charges en phosphore. La CMI a publié le rapport Priorité écosystème du lac Érié (PELE) en 2014, contenant une série de recommandations aux gouvernements sur la manière d’atteindre une réduction semblable de 40 %.

Même si la prolifération d’algues nuisibles prévue pour 2016 peut ne pas être aussi étendue que l’an dernier, cela ne signifie pas que le lac Érié est à nouveau sain. Dans son rapport PELE de 2014, la CMI a recommandé des contrôles sur les déversements issus d’installations septiques, l’élimination de la plupart des utilisations d’engrais phosphorés pour les pelouses et un plan exécutoire pour des réductions de charges de phosphore provenant des sources urbaines et agricoles. De plus amples travaux sont nécessaires pour réduire les apports de nutriments et les proliférations d’algues une fois pour toute afin que tous puissent jouir d’un lac propre et sain. 

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Kevin Bunch

Kevin Bunch is a writer-communications specialist at the IJC’s US Section office in Washington, D.C.

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