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Un plus grand nombre d’eaux partagées jumelées dans un projet de cartographie binationale

kevin bunch
Kevin Bunch

Par Kevin Bunch, CMI

                          

                    

La CMI n’existerait pas si l’eau s’arrêtait à la frontière entre le Canada et les États-Unis. Mais les rivières, les cours d’eau et les lacs ne sont pas limités par les frontières politiques, et pour que deux nations et leurs gouvernements puissent gérer efficacement les réseaux d’alimentation en eau, se préparer adéquatement aux inondations, répartir l’eau et surveiller les changements climatiques, ils doivent examiner la situation dans son ensemble. C’est là qu’interviennent les efforts d’harmonisation des données de la CMI.

Depuis janvier 2018, le Groupe de travail sur l’harmonisation des données hydrographiques transfrontalières de la CMI termine l’élaboration d’unités hydrologiques dans le Haut-Saint-Jean, le lac Champlain et la rivière Richelieu, et il s’intéressera ensuite à l’achèvement des efforts en cours dans les régions des Grands Lacs, du Bas-Saint-Jean, de l’Alaska, du Yukon et de la Colombie-Britannique. Ceci n’est que de la dernière étape de travaux qui ont commencé il y a dix ans. Avant les efforts d’harmonisation en 2008, le Canada et les États-Unis disposaient de données aléatoires sur les bassins hydrographiques provenant de l’autre côté de la frontière qui ne correspondaient pas.

Aux États-Unis, ces données s’arrêtaient à la frontière avec le Canada et, dans certaines régions, les bassins hydrographiques n’avaient même pas été cartographiés en entier, a mentionné Kim Jones, spécialiste des sciences physiques et responsable de la coordination technique nationale du Watershed Boundary Dataset (WBD) avec le US Geological Survey (USGS).

Judy Kwan, une scientifique du SIG d’Environnement et Changements climatiques Canada (ECCC), a déclaré que les ensembles de données canadiennes s’arrêtaient parfois à la frontière et s’étendaient parfois jusqu’aux États-Unis, mais si elles le faisaient, elles ne correspondaient pas aux données américaines sur les bassins hydrographiques. Chaque pays disposait également de ses propres unités de mesure qui ne correspondaient pas.

Depuis 2008, le groupe de travail a harmonisé des ensembles distincts de données nationales sur l’hydrographie géospatiale et les aires de drainage à l’intérieur d’un « couloir » transfrontalier, une étendue de bassins hydrographiques chevauchant la frontière entre les deux pays. L’objectif est de créer des réseaux hydrologiques continus et des aires de drainage connexes, appelés « unités hydrologiques », que les deux pays peuvent utiliser pour répondre à divers besoins en matière de modélisation, de cartographie et de rapports hydrologiques.

Le Groupe de travail sur l’harmonisation des données a fait le point sur ses projets transfrontaliers au cours d’une présentation organisée par la CMI à Ottawa en octobre 2017. Source : US Geological Survey et Environnement et Changements climatiques Canada
Le Groupe de travail sur l’harmonisation des données a fait le point sur ses projets transfrontaliers au cours d’une présentation organisée par la CMI à Ottawa en octobre 2017. Source : US Geological Survey et Environnement et Changements climatiques Canada

Pour lancer ces projets, il faut réunir des experts fédéraux, provinciaux et étatiques, a déclaré Mike Major, gestionnaire de projet au Centre canadien de cartographie et d’observation de la Terre de Ressources naturelles Canada. Dans certains cas, on peut faire face à des barrières linguistiques françaises et anglaises qui doivent être surmontées, comme dans le bassin versant de la rivière Richelieu et du lac Champlain entre New York, le Vermont et le Québec.

« Il faut comprendre qu’il y a beaucoup de défis à relever », a dit M. Major. « La langue, les restrictions de voyage, les autorités multiples – ce sont de véritables défis. »

Une fois ces obstacles surmontés, le groupe de travail compile autant de données et de ressources disponibles que possible auprès des partenaires, y compris l’hydrographie et les données altimétriques, a dit M. Major. Le groupe de travail combine tout ce matériel pour créer des ébauches préliminaires d’unités hydrologiques – des idées de base sur ce à quoi pourraient ressembler ces unités – avant d’organiser des ateliers avec des experts pour les examiner, en discuter et parvenir à un consensus sur des ébauches de limites plus finalisées.

Les limites conceptuelles provisoires approuvées sont ensuite utilisées pour élaborer des unités hydrologiques harmonisées qui sont fournies aux participants à l’atelier en vue d’une phase finale d’entente avant d’être intégrées aux fonds de données géospatiales de chaque pays – des cartes spécialisées cartographiant les eaux de surface du Canada et des États-Unis.

Les données hydrographiques transfrontalières continues, qui ont été achevées en 2014 et qui sont maintenant en phase de mise à jour et d’entretien, sont disponibles dans le Réseau hydrographique national du Canada (RHN) et dans le National Hydrography Dataset américain (NHD). Les données sur les unités hydrologiques transfrontalières continues sont transmises par l’intermédiaire du WBD américain. Puisque le groupe de travail veut s’assurer que les utilisateurs, les experts techniques et les cartographes ont accès à ces données et qu’ils savent comment les utiliser, des informations et de l’aide pour localiser les données sont disponibles sur un site Web hébergé par l’USGS, a déclaré M. Jones. Les données du Réseau hydrologique national canadien sont disponibles sur le portail Cartes ouvertes du Canada. Les données du NHD et du WBD des États-Unis sont accessibles via le site Web du NHD.

La coordination de toutes ces agences et tous ces gouvernements afin d’harmoniser ces données représente beaucoup de travail, mais c’est important. Susan Buto, spécialiste des sciences physiques à l’USGS et chef de l’équipe nationale du WBD, a déclaré qu’avant l’effort d’harmonisation, il était difficile d’évaluer ou de modéliser la qualité ou la quantité d’eau dans la région transfrontalière, ainsi que d’évaluer les facteurs de risque pour des dangers comme les inondations. Dans les régions transfrontalières qui sont aux prises avec une combinaison de ces problèmes, comme le lac Champlain et la rivière Richelieu ou la rivière Souris, il est difficile de trouver des approches pour régler les problèmes liés à l’eau sans disposer de données hydrographiques exactes et continues.

M. Major a ajouté qu’en plus d’évaluer la santé des ressources en eau et des bassins hydrographiques, le travail d’harmonisation est nécessaire pour se préparer aux effets du changement climatique et trouver la meilleure façon d’améliorer l’adaptation. Chaque région connaîtra ses propres changements et défis spécifiques au cycle de l’eau et aux écosystèmes aquatiques dus au changement climatique, a-t-il dit.

 « Qu’il s’agisse de problèmes de qualité de l’eau liés à l’identification des facteurs de stress sur les ressources en eau – ruissellement provenant de l’agriculture ou d’autres sources –, la résilience face aux changements climatiques, la détermination de la perte d’habitats, la propagation des espèces envahissantes, a déclaré M. Major, ce sont tous des éléments importants pour la gestion des ressources en eau, et la base est l’information sur l’hydrographie. »

Dans certaines régions, la portée initiale du projet a été élargie pour inclure des aires de drainage qui contribuent au-delà du couloir binational afin d’aider à développer la haute résolution (HR) du NHDPlus, a déclaré Peter Steeves, spécialiste des sciences physiques de l’USGS. 

Considéré par M. Major comme étant « le meilleur programme actuel de données hydrographiques en Amérique du Nord », le NHDPlus HR, produit pour les États-Unis contigus, est un cadre hydrologique géospatial évolutif qui comprend un réseau de cours d’eau, des bassins versants en altitude qui relient le paysage au réseau de cours d’eau et des couches de données pour comprendre la direction du débit et l’accumulation d’eau dans le paysage. Ce cadre appuiera une foule d’utilisations, comme une modélisation plus précise de la qualité de l’eau, une meilleure information pour la conception de nouveaux ponts et ponceaux et des prévisions de crues à plus haute résolution. En fin de compte, a-t-il dit, il aimerait qu’un modèle de données hydrographiques unifié soit utilisé dans toute l’Amérique du Nord en intégrant également le Mexique, même si une telle collaboration n’a pas encore été établie.

Le Canada et les États-Unis participent à divers projets de cartographie concertée — des routes aux infrastructures énergétiques —, mais grâce à ce projet d’harmonisation des données, les réseaux d’alimentation en eau naturels sont peut-être l’un des projets les plus avancés, même s’ils sont incroyablement complexes.

Kevin Bunch est rédacteur spécialiste des communications au bureau de la Section américaine de la CMI à Washington, D.C.

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Kevin Bunch

Kevin Bunch is a writer-communications specialist at the IJC’s US Section office in Washington, D.C.

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